Le jeu culte de mon enfance que personne ne connait

Le jeu culte de mon enfance que personne ne connait

Paul Aureckin

Le jeu dont je vais parler durant ce témoignage n’a rien de culte ni de mémorable et je suis surement un des seuls à lui vouer une place aussi importante dans le paysage vidéo ludique. Il est même plus que probable que l’actuel lecteur n’en a jamais entendu parler. Dans le cas contraire j’imagine que votre surprise n’en sera que plus grande lorsque je vais révéler que le jeu sur lequel portera mon témoignage se nomme Red Faction Guerrilla. Un jeu qui malgré la couleur aride de sa jaquette (alternant entre teintes de rouilles et d’ocres) malgré la violence sous jacente qu’évoque les écritures marqué au fer rouge sur la boite, malgré l’imagerie guerrière omniprésente qui en vient même à s’immiscer dans son titre. Un jeu qui malgré cette surenchère d’artifices tentant de le laisser paraitre rugueux reste la friandise la plus goûtue à laquelle je pus toucher dans ce médium. Un délice qui se mange sans faim, un plaisir de tous les instants dans lequel l’embarras d’avoir un tel amusement devant un hors d’œuvre sans prétention s’efface au bout de la 1ere heure de dégustation. En effet, j’use du terme  « hors d’œuvre sans prétention » car ici je parle bien d’un jeu de type TPS de la 7ème génération, dans lequel scénario prémâché par les obligations de rentabilité, héros effacés aux profits de clichés installant le joueur dans une zone de confort, histoire manichéenne et ennemis déshumanisés sont de la partie, et c’est peut être pour le mieux vue que mon premier contact avec le jeu se fit lors de mes 8 ans.

Mon frère était en train de jouer à une démo dont les créateurs, sachant pertinemment que l’intérêt du jeu résidait dans son gameplay, ne s’étaient pas donné la peine de la faire traduire en plusieurs langues. Cependant c’est sans surprise que mon frère s’empara du jeu instantanément car n’importe quelle personne consciente du potentiel de la mécanique autour duquel s’articule le jeu ne pourrait résister à son appel. « Quelle est cette fameuse mécanique ?» me demande le lecteur assidu que je m’empresse d’ailleurs de remercier pour l’attention porté à mon texte. Ma foi c’est aussi simpliste que complexe. Le principe de base du jeu est que la majorité des éléments du décor sont destructible. Bien entendu je ne vais pas expliquer point par point pourquoi dans ce jeu cette idée est particulièrement bien desservie. En effet ce n’est pas le sujet de mon texte, mais sachez tout de même que le moteur physique est une merveille inégalé à mes yeux, un bijou technique qu’on ne penserait issus que d’une démo qui l’est tout autant. C’est ainsi que Guerilla fit son entré dans l’armoire de jeu de mon frère qui ne pris d’ailleurs jamais la peine de le finir à mon grand désarrois, étant un spectateur admiratif de ses exploits.

Pendant un temps j’ai oublié ce jeu, car le sceau pegi d’un orange brut m’avait toujours défendu de tenter le moindre rapprochement, il s’était greffé avec violence sur une œuvre enfantine dans l’âme prétextant une fois de plus la présence d’un contenue outrageux. Pourtant ce jeu était un objet de partage, rare sont ceux qui le connaissent dans ma sphère privé et le faire découvrir à mes amis était toujours un plaisir, non pas à cause de l’égocentrique besoin de se sentir important mais plutôt grâce à l’envie de ponctuer sa vie d’instant de bonheur. De fait, les rires communicatifs et le temps qui passe sans que l’on puisse s’en rendre compte faisaient de Guerrilla un magnifique catalyseur de ces émotions. Mais au-delà de ces divers instants assez agréables que je partageais, il y avait une démarche presque analytique, celle d’observer comment mes amis allaient réussir à accomplir les différentes quêtes annexes, instant où le joueur était soumis à sa propre liberté. Cela me permettait d’en apprendre sur eux et de répondre aux différentes interrogations que je porte à leur égard. Par exemple : avaient t-ils le sens du spectacle ? Ce jeu permettait de répondre à la question et à partir de la réponse on pouvait déduire de très nombreux traits de caractères. Au-delà de l’amusement c’était aussi captivant, plutôt fascinant, en fait réellement hypnotisant.

Ce besoin de compréhension par l’observation (bien que n’ayant pas été enfanté par le jeu) demeure un aspect de ma personnalité que Guerrilla a révélé à moi-même.

Quelques années plus tard, c’est en me souvenant de ce jeu que je me suis rendu compte combien il était important. Je dois bien admettre que, fainéant par nature, je n’avais pas vraiment fais d’effort pour tenter de retrouver ce jeu dans ma mémoire. Je vagabondais sur internet et comme à mon habitude je suis passé par Youtube pour observer mon fil d’abonnement,  le seul rempart entre moi et la procrastination inutile. Je pus observer une apparition discrète mais que j’ai tout de même remarqué,  c’était une chronique bien connu sur JVC : Speed Game. Ici l’épisode portait sur le tout premier Red Faction sortie en 2001.  C’est alors que je regardais l’émission qu’un effet mémoriel insoupçonné me ramena des souvenirs du jeu sur lequel porte mon texte. En effet,  Red Faction Guerilla faisait des rappels constant à son prédécesseur et par conséquent ce que je ne pouvais percevoir avant m’était réapparu avec violence, tel que je l’ai perçu c’était l’ancien jeu qui faisait des références au plus récent. Vision totalement absurde et paradoxale mais l’effet recherché par Red faction Guerrilla a tout de même été accompli : un fort retour dans le passé à été provoqué par ces références dispersé dans le jeu. Seulement cela ne s’est pas déroulé au moment voulu durant mon aventure dans la saga Red Faction. Et ainsi la mécanique de gameplay centrale du jeu auquel on pourrait attribuer de manière ignorante un aspect gimmick, m’est finalement réapparue dans toute sa splendeur et son utilité au sein même de l’environnement de jeu. Bien évidemment je le formule de cette manière mais à l’époque je me serais plutôt exprimé de façon enfantine, mettant en avant les caractéristiques impressionnantes des explosions plutôt que leur grand intérêt dans la construction du monde ouvert même si, à mes yeux le terme bac à sable serait plus approprié.

C’est donc porté par un engouement soudain pour un jeu oublié de tous que j’ai commencé à faire de nombreuses sessions. Aujourd’hui cela ne fait que deux ans que je n’ai pas touché à la jaquette. Pourtant, souvent, le souvenir des diverses situations de jeux spectaculaires créées de manière organique me réapparait de manière assez précise, avec ce même ressenti dont le plus grand représentant me semble être Farcry ; cette impression qui se base sur le fait que l’illusion de créer ses propres scènes d’actions les rend d’autant plus grisante. Sensation que malheureusement, j’ai du mal à retrouver dans les jeux récents qui malgré leur monde ouvert, me semble plus un couloir que jamais.

Je suis bien conscient qu’au travers de ce texte je me suis éloigné d’une certaine nostalgie que peut inspirer le jeu de son enfance. C’est un choix délibéré que de m’être élevé au dessus de ce carcan poétique suggéré par la description de son enfance au travers d’un jeu. J’aurais pu parler de Journey, le premier jeu indépendant auquel j’ai joué et ainsi me faciliter grandement la tache mais, cela n’aurait pas été honnête, ni pour moi ni pour vous. Un grand mensonge organisé dans l’objectif d’être celui que je ne suis pas… Non ! En effet je ne suis pas un adolescent poétique à moitié torturé trouvant refuge dans les jeux vidéo… Malheureusement pour moi il est difficile d’évoquer la compassion au travers de ma vie. Je n’irais pas jusqu’à me flageller de manière publique car, en plus d’être ridicule cela serais en contradiction totale avec ce que j’ai dit précédemment ; et je ne compte pas non plus simuler un semblant de complexité dans ma personnalité. Simplement, je profite de cette conclusion pour clarifier certaine choses et remercier certaine personne. Notamment Esteban Grine, pour m’avoir donné une raison de mener un projet jusqu’au bout. Thymael  (en espérant ne pas écorcher son pseudonyme), pour m’avoir appris l’existence de l’appel à contribution ainsi que les quelques personnes m’ayant aidé à mener ce projet en me fournissant un regard neuf  et rassurant sur ce texte.